Selon la mécanique quantique, il n’est pas possible, même en principe, d’en savoir assez sur le présent pour proposer une prédiction complète du futur.

L’homme est libre, comme la terre est immobile. Tout est combiné pour ces illusions.

Prédire, c’est attendre, mais sans être sûr que « ça » viendra.

Et même aussi j’ose croire que la joie intérieure a quelque force secrète pour se rendre la fortune plus favorable. Je ne voudrais pas écrire ceci à des personnes qui auraient l’esprit faible de peur de les conduire en quelque superstition.

Préparons-nous à entendre l’espace crier.

La prévision est toujours une illusion d’optique. En réalité, bien que nous puissions opérer en nous extériorisant dans l’espace-temps que nous imaginons futur, nous travaillons toujours dans le studio de notre mémoire où nous élaborons notre film.

Dans le renouvellement de la création, à chaque souffle, l’instant de l’anéantissement coïncide avec l’instant de la manifestation du semblable.

L’avenir ne peut être prédit, mais les avenirs peuvent être inventés.

Ce que nous attendons de la science nous situe aux antipodes l’un de l’autre. Vous, vous croyez en un Dieu qui joue aux dés, et moi je crois aux règles parfaites de la loi dans un univers où il existe quelque chose d’objectif, que je m’efforce de saisir d’une façon farouchement spéculative.

Dans la chute en ligne droite qui emporte les atomes à travers le vide, en vertu de leur poids propre, ceux-ci à un moment indéterminé, en un endroit indéterminé, s’écartent tant soit peu de la verticale. Sans cette déclinaison, tous, comme des gouttes de pluie, tomberaient de haut en bas à travers les profondeurs du vide ; entre eux nulle collision n’aurait pu naître et jamais la nature n’eut rien créé.

Le nez de Cléopâtre, s’il eut été plus court, toute la face de la terre aurait changé.

Je fais ainsi de la narration le critère distinctif entre le temps psychique et le temps cosmologique. C’est par là que le temps s’arrache à la fiction.

Il n’y a pas un temps des philosophes ; il n’y a qu’un temps psychologique différent du temps du physicien.

Car le temps est ceci, à savoir nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur.

En somme, nous rendons au cogito une épaisseur temporelle.

Qu’y a-t-il en nous pour comprendre que le monde tout entier est beau non par sa masse mais par sa forme rationnelle ? En ce qui concerne le temps, il n’en va pas autrement… La mesure de cet ordre vit, pour sa part, sans la vérité éternelle, sans être vaste par sa taille ni perpétuelle par ses prolongations. Mais son pouvoir est grand au-delà de tout espace, immobile éternellement au-delà de toute durée.

En effet, comme le monde se meut dans l’âme (car l’univers sensible n’a pas d’autre lieu que l’âme), il se meut aussi dans le temps qui appartient à cette âme. L’âme produit ses actes l’un après l’autre, dans une succession toujours variée ; avec un nouvel acte, elle engendre ce qui suit ; et en même temps qu’un autre acte de pensée qui suit le précédent, se produit un jour un événement qui n’existait pas auparavant.

Le « On » ne meurt jamais, parce qu’il ne peut pas mourir, dans la mesure où la mort est mienne… Jusqu’à la fin, « on a encore le temps »… On ne connaît que le temps public qui, nivelé, appartient à tous, autant dire à personne.

Si l’accès à Dieu est la foi et que le fait d’entrer en rapport avec l’éternité n’est rien d’autre que cette foi, alors la philosophie n’appréhendera jamais l’éternité et par suite elle ne pourra jamais en faire un usage méthodique en l’utilisant comme une intuition possible en vue d’une discussion sur le temps.

Le temps est l’image mobile de l’éternité immobile.

Même si l’on doit exclure toute métaphysique, on doit alors définir directement la réalité par la temporalité. Car ce qui seul importe ici est le contraste avec l’être intemporel de l’idéal.

Eternité est un enfant qui joue au trictrac : c’est la royauté d’un enfant.

[Les fêtes] opposent en effet une explosion intermittente à une terne continuité, une frénésie exaltante à la répétition quotidienne des mêmes préoccupations matérielles, la fièvre de ces instants culminants au tranquille labeur des phases atones de son existence.

… il n’y a pas de souvenir qui puisse être dit purement intérieur… [La mémoire] ne conserve pas le passé, mais elle le reconstruit à l’aide des traces matérielles, des rites, des traditions qu’il a laissés, et aussi à l’aide des données psychologiques et sociales récentes, c’est-à-dire avec le présent.

Les divisions en jours, semaines, mois, années, etc., correspondent à la périodicité des rites, des fêtes, des cérémonies publiques. Un calendrier exprime le rythme de l’activité collective en même temps qu’il a pour fonction d’en assurer la régularité.

… la faculté de se sentir pour un temps en dehors de l’histoire. L’homme qui est incapable de s’asseoir au seuil de l’instant en oubliant tous les événements passés, celui qui ne peut pas, sans vertiges et sans peur, se dresser un instant tout debout, comme une victoire, ne saura jamais ce qu’est un bonheur…